Les obligations du bailleur et du locataire

Lors de la location d’un logement, social ou privé, le bailleur et le locataire ont des obligations l’un envers l’autre. Ce principe est inscrit dans la loi du 6 juillet 1989. Le bailleur doit ainsi selon l’article 6 de cette loi :

  • délivrer un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé.
  • délivrer au locataire le logement en bon état d’usage et de réparation ;
  • assurer au locataire la jouissance paisible du logement ;
  • entretenir les locaux en état de servir.

En échange, le locataire devra selon l’article 7 de cette même loi : payer le loyer et les charges récupérables ;

  • user paisiblement des locaux loués ;
  • répondre des dégradations et pertes ;
  •  prendre à sa charge l’entretien courant du logement ;
  • permettre l’accès aux lieux loués pour la préparation et l’exécution de travaux d’amélioration ;
  • ne pas transformer les locaux et équipements loués sans l’accord écrit du propriétaire
  • s’assurer contre les risques dont il doit répondre en sa qualité de locataire.

Un problème existe toutefois si le locataire et le bailleur n’ont pas rempli leurs obligations. Dans le cas présent, la locataire a intenté une action en justice contre son bailleur en 2012, estimant que son logement ne respectait pas les critères de décence définis au décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002, et présentait un danger pour la santé et la sécurité des occupants au titre de l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989. Les installations de gaz et d’électricité n’étaient pas aux normes et présentaient un danger direct pour la locataire en cas de mise en route. Elle avait alors procédé à la consignation des loyers.

Le bailleur, face au défaut de paiement des loyers, a demandé la résiliation du bail au titre de la clause résolutoire. Il demandait ensuite à la justice l’expulsion de la locataire. Au gré des procédures, la locataire avait été expulsée puis réintégrée dans son logement à plusieurs reprises, chacune des parties réclamant remboursements des loyers et charges, ainsi que des indemnisations pour le préjudice subi.

La décision de la Cour de cassation

La Cour de cassation, plus haute juridiction française, devait donc juger en droit si la décision de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence de condamner la locataire au paiement des loyers et indemnités d’occupation malgré l’indécence du logement était justifiée ainsi que le bailleur pour ses différents manquements aux critères de décence. La Cour a estimé que la locataire ne pouvait pas consigner d’elle-même les loyers dus. En effet, seul le juge peut autoriser cette consignation afin d’éviter un préjudice pour le bailleur en cas de mauvaise foi du locataire. Une exception existe à cette règle cependant : l’exception d’inexécution. Le locataire est en droit de ne pas payer son loyer tant que le bailleur ne répond pas à son obligation de délivrance du logement. C’était l’argument principal de la locataire concernée par cette affaire.

La Cour a certes entendu que le logement en question ne répondait pas aux critères de décence fixés dans la loi du 6 juillet 1989 et le décret du 30 janvier 2002. Toutefois, la locataire n’a pas pu prouver devant la Cour que le logement était entièrement inhabitable. Or les critères d’habitabilité d’un logement diffèrent de ceux des critères de décence. Un logement est inhabitable s’il ne comprend pas les éléments définis au décret n° 87-149 du 6 mars 1987, tels qu’une salle d’eau, une cuisine, un ouvrant sur l’extérieur pour assurer la ventilation de l’air et un éclairement suffisant, une alimentation en gaz ou électricité, et une hauteur minimale sous plafond de 2m20. Un logement inhabitable est donc plus difficile à prouver qu’un logement indécent. La locataire ne pouvait arguer l’exception d’inexécution et a été condamnée aux paiements des loyers et charges dus, ainsi que les indemnités d’occupation, même si le logement était indécent. Le locataire n’a donc pas le droit de consigner de lui-même les loyers et charges sans autorisation du juge, même si le bailleur est en tort. Les exceptions sont rares et difficiles à prouver. Il est préférable de payer son loyer et ses charges, et d’intenter ultérieurement une action contre le bailleur pour obtenir réparation d’un préjudice, qu’il s’agisse de critères de décence, de l’exécution de travaux, d’erreurs de calcul du loyer, ou de régularisations de charges abusives.

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