Sous l’égide du Ministère de l’agriculture, un accord interprofessionnel a été signé le 3 mai par la filière « viande » afin de mieux prendre en compte la volatilité des matières premières agricoles dans la formation des prix. L’accord consiste à ouvrir des négociations commerciales entre éleveurs, industriels et distributeurs lorsque le coût des aliments pour animaux connait des variations « hors normes ». Le dispositif est censé fonctionner à la fois en cas de hausse et de baisse des matières premières et permettrait donc de protéger non seulement les producteurs mais aussi les consommateurs.

Mais pour la CLCV la portée réelle de cet accord est très limitée. En effet, des négociations commerciales existent déjà au sein des filières entre les professionnels et les critères techniques retenus dans l’accord ne permettront pas d’en augmenter la fréquence. L’essentiel du problème, à savoir le faible pouvoir de négociation des éleveurs face à l’aval de la filière et en particulier la grande distribution, demeure irrésolu. En ce qui concerne la viande de porc par exemple, l’observatoire des prix et des marges a montré que les marges de la grande distribution avaient progressé au cours des années 2000 alors que le prix du porc payé aux éleveurs s’érode.

Quant à l’idée que des négociations commerciales pourraient à elles seules permettre de répercuter jusqu’au consommateur les baisses du coût de production au niveau des élevages, elle est battue en brèche par les chiffres. Ainsi entre 2008 et 2010, le prix de l’aliment pour bovins perdait 18 % de sa valeur alors que le prix du bœuf en rayons augmentait de 2 %. On observe un phénomène comparable dans les filières porcs et volailles. En revanche, les hausses des prix des matières premières enregistrées en 2008 se sont bel et bien traduites par une hausse des prix de la viande en rayon.

Les consommateurs, dont aucun représentant n’est d’ailleurs signataire de l’accord, n’ont donc pas grand-chose à attendre de ce dispositif. La CLCV considère que la maîtrise des prix alimentaires passe par une politique de la concurrence visant à mettre fin aux positions dominantes de certains professionnels de l’industrie ou de la grande distribution qui sont aujourd’hui en mesure de dicter leurs prix. Il revient en outre aux pouvoirs publics de garantir une plus grande transparence sur la formation des prix et d’assurer une vigilance sur les marges réalisées par les intermédiaires.

Publié le 06 mai 2011