« Une loi qui n’oppose pas les propriétaires aux locataires ». De belles paroles prononcées par Julien DENORMANDIE. Mais une fois passés les éléments de langage habituels, place à la réalité. Et c’est sans surprise que cette loi est un cadeau aux bailleurs et aux professionnels de l’immobilier.

Ainsi :

• L’encadrement des loyers est enterré. Le dispositif ne devient que facultatif et ne pourra être instauré que dans les zones où les perspectives de construction de logements sont limitées. Autant dire qu’en dehors de Paris, des villes volontaristes comme Lille et Grenoble ne pourront pas le mettre en place. Mais ce n’est pas une loi contre les locataires…

• La clause pénale refait son apparition. Un locataire pourra se voir imputer une pénalité de 
10 % par exemple s’il paye son loyer avec 1 jour de retard… On oublie juste de dire qu’une telle pratique est abusive et sanctionnée par les juges dès lors que la clause ne prévoit aucune indemnité équivalente pour le locataire lorsque le bailleur ne remplit pas ses obligations (travaux…). Et comme cela n’est jamais le cas, les clauses insérées seront alors illégales. Les juges apprécieront de revoir devant eux ce type de litiges. Mais ici encore, c’est pour le bien des locataires…

• Des frais de relance seront également imputés au locataire en cas de retard. Cela fera un beau cumul avec la clause pénale. Une mesure en contradiction avec les dispositions du Code des procédures civiles d’exécution. On voit déjà les bailleurs, ou plutôt les agents immobiliers, facturer 30 € le courrier AR et multiplier les relances inutiles. Les locataires apprécieront.

• Le locataire en zone tendue ou qui trouve un emploi devra désormais respecter un délai de préavis de deux mois au lieu d’un mois actuellement. Et comme le loyer est dû pendant toute la durée du délai de préavis, que le locataire occupe ou non les lieux, de nombreux locataires auront des difficultés financières au moment de leur déménagement puisqu’ils devront également s’acquitter du loyer de leur nouveau logement.
• La commission de contrôle des professionnels de l’immobilier ne pourra plus prononcer de sanction disciplinaire. A priori, les sénateurs ont estimé que les agents immobiliers et autres syndics ont fait preuve de suffisamment d’honorabilité pour se passer d’une telle mesure.

• La révision biennale de la liste des charges que le bailleur peut réclamer aux locataires aboutira inexorablement à une hausse de la facture pour ces derniers. Ici encore, une disposition qui n’est nullement dans l’intérêt des bailleurs, bien évidemment.

• Contrairement aux promesses du Gouvernement, la loi ELAN ouvre une brèche inédite dans l’application de la loi SRU. Les constructions de logements sociaux qui devaient se faire sur 9 ans le seront finalement sur 25 ans. Par ailleurs, en intégrant les logements vendus, ceux en accession sociale et les places d’hébergement d’urgence dans l’objectif de 25 %, le nombre réel de logements sociaux familiaux va considérablement diminuer.
La liste pourrait être encore bien longue.

En revanche, rien sur les modalités de restitution du dépôt de garantie (principal litige en matière locative), rien sur les facturations abusives d’états des lieux, les régularisations tardives des charges et la minoration volontaire des provisions, rien sur les fausses cautions bancaires (lorsque le bailleur exige, aux frais du locataire, que celui-ci dépose l’équivalent d’un an de loyer sur un compte bancaire), rien sur l’information du locataire concernant l’âge des éléments d’équipement dans le logement… Et ici encore, la liste pourrait être plus longue.

L’ensemble de ces mesures aura pour conséquence de précariser encore plus les locataires et de remettre au goût du jour des abus auxquels le législateur avait pourtant mis fin.
Nous appelons les parlementaires à revenir sur ces dispositions qui vont déséquilibrer les relations locataires-bailleurs au seul profit de ces derniers.

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